Le CCNE ( Comité National Consultatif d’Ethique) a rendu un avis, il y a un an, sur les demandes sociétales du recours à l’AMP. Avis du 15 juin 2017 n° 126.
Ce Comité s’est prononcé favorablement à une extension de la PMA pour toutes mais a émis une réserve pour les femmes seules indiquant que la plupart des études souligneraient la plus grande vulnérabilité des familles monoparentales.
Si cette plus grande vulnérabilité n’est pas contestable, le CCNE a tort de stigmatiser les femmes seules qui souhaitent avoir recours à la PMA et d’affirmer qu’elles constitueront des futures familles monoparentales d’une grande vulnérabilité.
En effet, le CCNE méconnait le “profil” des femmes qui ont eu recours à la PMA à l’étranger et qui auront recours à la PMA en France.
Une étude très intéressante a été publiée et mérite qu’on s’y intéresse, que peut-être le CCNE s’y intéresse.
Cette étude est celle de Madame Virginie Rozée Gomez, chercheure à l’INED (Institut national d’études démographiques) en accès libre sur le site journal open edit, extrait de la revue TERRAIN.
Il ressort de cette étude datant de 2013:
- que les femmes qui ont eu recours à l’AMP à l’étranger sont nées entre 1960 et 1970
- ces femmes sont principalement “urbaines”, vivent principalement à Paris
- ces femmes seules ayant eu recours à la PMA à l’étranger appartiennent à la classe “moyenne supérieure” de la Société française
Un tableau est inséré, indiquant les professions de ces femmes interrogées:
Comme Madame Dominique Melh, Virginie Rozée Gomez analyse par la suite les raisons pour lesquelles ces femmes en viennent à choisir de faire un enfant seul.
Les mêmes conclusions pour les deux études: ces femmes ont pour la plupart repoussé leur projet de maternité car elles ont privilégié leur carrière mais surtout ont attendu de trouver l’homme idéal avec qui elles pourraient avoir un enfant.
Ne l’ayant pas trouvé et ne voulant pas faire un enfant dans le dos d’un homme, elles ont choisi de faire une PMA solo à l’étranger.
Cette étude révèle surtout que ces femmes ont un même profil qui n’est pas celui de la majorité des familles monoparentales en France.
Les femmes qui élèvent seules un enfant sont en effet vulnérables surtout économiquement, elles sont seules après un divorce ou une séparation et doivent tout assumer et se charger seules de l’éducation leurs enfants, sans l’avoir choisi.
L’observatoire des inégalités, en novembre 2017 avait relevé: “Famille monoparentale rime souvent avec pauvreté. “
Une étude a été publiée également en 2008, étude démographique au niveau européen qui associe la vulnérabilité à la pauvreté et à la difficulté d’insertion professionnelle de ces femmes seules.
Cette étude a pour titre: les familles monoparentales, des familles comme les autres mais des parents vulnérables.
C’est certainement à ces études que le CCNE a pensé lorsqu’il a rédigé cet avis et qualifié ces familles de vulnérables.
Toutefois, je pense qu’il convient de réfléchir et de se demander: quelles seront les femmes qui auront recours à la PMA seules si celle-ci est ouverte en France et si cette dernière est prise en charge par l’assurance maladie ?
A mon avis, ce ne seront pas les jeunes filles issues d’un milieu défavorisé, ayant une faible insertion professionnelle qui penseront à se diriger vers ce type de procréation.
Il y en aura très certainement mais soyons honnêtes, la majorité des femmes qui souhaiteront faire seules un enfant et l’élever seules également, seront les mêmes que celles qui se sont déjà dirigées vers l’étranger: des femmes d’une classe sociale “moyenne supérieure” , très âgée en âge de fertilité ( entre 35 et 40 ans) et par définition peu vulnérables économiquement et psychologiquement.
En conclusion, le CCNE se trompe lorsqu’il émet cette réserve, les femmes seules qui auront recours à la PMA seules, ne seront pas des familles monoparentales vulnérables.